Jusqu’au 26 mai 2012, Henri Bureau, ancien grand reporter de l’agence Sygma, expose une série de photographies des années 1960 à 1980 à la galerie « Les yeux fertiles », rue de Seine à Paris.
« La cause est entendue, c’est par temps de guerre que le photojournalisme a produit ses images historiques, faisant naître par là-même ce fameux mythe du reporter, toujours bien vivant, et qui provoque quelques désillusions. » écrivait en 1988, Michel Guerrin dans « Profession photoreporter » (Ed. Gallimard), un livre qui contribua largement au mythe de « l’âge d’or » du photojournalisme « à la française ».
« Henri Bureau a ouvert sa route, commencé son cheminement professionnel au plus bas, au pied de l’échelle : paparazzi ! C’est dangereux, on peut y perdre, devenir un voyeur cynique, un traqueur pour voler un peu de l’intimité d’une proie, capturer des miettes de son misérable petit tas de secrets, comme disait Malraux. Sa part des anges lui a fait chercher plus haut. » écrit Pierre Schoendoerffer, le cinéaste qui nous a quittés cette année. Il ajoute dans cette préface au livre de souvenirs d’Henri Bureau « Il faut aussi un regard. Un regard qui ne dégrade jamais l’homme, même dans ses pires horreurs ».
Un regard, Henri Bureau l’a eu pour saisir des moments historiques, comme le retour du général de Gaulle en 1968, la révolution des œillets au Portugal, ou la guerre du pétrole Iran-Irak. Henri Bureau est une légende vivante. Comme beaucoup de grands reporters, il a ses détracteurs et ses fans. L’un me dit : « C’est un presse-bouton illettré. » L’autre m’affirme « Il ne se trompait jamais. Il savait tout de suite quelle était la bonne image. » Cher lecteur, le monde du photojournalisme est comme tous les secteurs professionnels, il cultive ses jalousies, ses connivences, ses amitiés et ses rancœurs.
Mais tout cela semble aujourd’hui largement passé au-dessus de la tête d’Henri Bureau. Il ne fréquente que ses amis, une bande de baroudeurs, et poursuit sa déjà longue route avec une nonchalance un peu bougonne qui dissimule une grande sensibilité et une modestie certaine.
Lorsqu’il a publié « Bouclages » en 2010, son livre de souvenirs de reportages, je l’avais interviewé à Perpignan durant le festival Visa pour l’image. Il était content, car l’écriture de ce livre lui avait apporté « beaucoup de bonheur ». Depuis, j’ai recroisé sa grande silhouette barbue dans plusieurs festivals où il a retrouvé quelques confrères un peu perdus de vue ces dernières années.
Et puis, une première exposition l’an passé dans la même galerie, lui avait prouvé qu’il n’était pas oublié, et surtout que ses images restaient des moments de notre histoire. Que peut demander de mieux un photoreporter ? De vendre quelques tirages ? Il s’en est vendu l’an passé et nul doute qu’il s’en vendra encore cette année.
Entre-temps avec Noémie Philippot, il a ouvert un site web pour présenter plus d’images. Je vous encourage à le visiter.
Entre Sanary-sur-mer et l’Aude, Henri Bureau continue à revoir ses reportages, et nous n’avons plus qu’à espérer qu’un éditeur de beaux livres nous édite une belle rétrospective du travail d’un des grands photojournalistes du XXème siècle.
Michel Puech
Publié dans le Club Mediapart
L’exposition
Galerie Les yeux fertiles 12 rue de Seine Paris 6ème
Le livre
Bouclages, une vie de reporter d’Henri Bureau, préface de Pierre Schoendoerffer – Editions Florent Massot, 20 EurosDernière révision le 12 mars 2024 à 12:09 pm GMT+0100 par
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