Dimanche 2 septembre 2012 – Bloc note en direct de Perpignan publié dans Le Journal de la Photographie et dans le Club Mediapart
La tramontane souffle toujours, entraînant les estivants et les festivaliers vers les expositions. Conclusion : profitons du déjeuner dominical pour visiter le Couvent des Minimes.
Dimanche 2 septembre
12h00 – L’exposition phare, le coup de cœur de Jean-François Leroy, c’est incontestablement « Ces petites filles que l’on marie » de Stéphanie Sinclair de l’agence VII pour le National Geographic Magazine.
Stéphanie Sinclair a découvert l’existence des mariages d’enfants en 2003, alors qu’elle enquêtait sur les auto-immolations en Afghanistan. Toutes les victimes qu’elle rencontrait avaient été mariées très jeunes, certaines à neuf ans à peine, et toujours à des hommes bien plus âgés. Que ce soit en Afghanistan, au Népal, en Éthiopie, en Inde ou au Yémen la photographe nous montre des couples disharmonieux : monsieur d’un âge certain, madame encore dans l’enfance !
Je suis attiré par la couverture des événements en Grèce par les photographes de l’AFP. Louisa Gouliamaki, Angelos Tzortzinis et Aris Messinis nous montrent l’incroyable violence des manifestations. « C’est dur des deux côtés, pour les manifestants comme pour la police » raconte Louisa Gouliamaki, 43 ans, dans le catalogue officiel du festival. Les photos montrant des policiers pris dans les flammes des cocktails molotov sont particulièrement impressionnantes. Elles ont déjà été primées plusieurs fois dans des concours internationaux.
L’AFP est cette année très à l’honneur à Perpignan avec trois expositions. Le photographe chilien Pedro Ugarte et son confrère britannique Ed Jones, en poste respectivement à Hong-Kong et à Pékin, exposent leurs reportages sur la Corée du Nord. Ils ont exceptionnellement bénéficier d’une ouverture des frontières aux journalistes étrangers à l’occasion du 100ème anniversaire de la naissance de Kim II-Sung. Ils ont découvert un pays qu’ils décrivent comme « une machine à remonter le temps ». Effectivement les images nous ramènent au temps de la guerre froide !
Enfin, le photographe afghan Massoud Hossaini, qui est non seulement le premier photographe à décrocher un Prix Pulitzer (voir notre article) est également le premier photographe à apporter ce prix à l’agence française. Il nous montre son pays en guerre depuis des décennies. Le cliché de la fillette en vert qui hurle sa détresse au milieu des morts et des blessés d’un attentat à Kaboul est devenu une icône. « J’avais du mal à voir dans mon objectif parce que je pleurais, » se souvient Massoud. Ce cliché lui a valu quatre grandes récompenses, un Pulitzer, un 1er prix aux « Pictures of the Year », un 1er prix au National Press Photographers’ Association et un 2ème prix au World Press Photo. A vrai dire, j’espère arriver à rencontrer ces photographes dans les jours qui viennent.
Je prends également le temps de revoir « Zone d’inconfort absolu »», c’est ainsi que les soviétiques appelaient l’Arctique, un reportage magnifique de Justin Jin de l’agence Cosmos pour Géo Allemagne. Staline y avait implanté des goulags, ensuite quelques villages ou petites villes ont été désertés. Ils trouvent une nouvelle vie avec la découverte de gisements de gaz. De belles images dans une lumière glaciale !
16h00 – Il est temps d’avaler quelque chose. Le Lisboa, 22 place Rigaud à l’avantage de servir à toute heure un « encas » certes pas gastronomique, mais efficace.
17h00 – En prévision de la conférence demain matin au Palais des Congrès, allons voir « Un génie audacieux, la révolution numérique » de Doug Menuez de Getty Images. Doug a couvert pendant plus de quinze ans à partir de 1985 le travail d’une tribu d’ingénieurs de la Silicon Valley. Un travail en N&B, avec des pellicules Kodak Tri X. Steve Jobs, Bill Gates sont là encore tout jeunes. On y voit l’envers du décor du mythe. Non, la Silicon Valley n’était pas un paradis, mais une usine où les cerveaux étaient pressurés, où les dépressions, voire les accidents ou suicides étaient la réalité d’hommes travaillant jour et nuit. « Ils ont créé plus d’emplois que personne d’autre à aucune autre époque de l’histoire de l’humanité » dit Doug Menuez.
19h00 – Récréation ! C’est l’heure du traditionnel «Welcome drink » à l’Hôtel Pams qui, chaque année, réunit les membres de l’organisation, les premiers photographes et autres professionnels arrivés à Perpignan. L’ambiance est bon enfant. D’une année sur l’autre les afficionados se retrouvent ce soir-là. Sur le pas de la porte, Caroline Laurent-Simon, du journal Elle, qui anime les conférences du matin au Palais de Congrès, vient de découvrir que je connaissais son époux Marc Simon, picture-editeur de VSD avant elle ! Nous rions ensemble.
Laurent Langlois de la société Abbax, qui réalise les fameuses projections du Campo Santo, me confie « Nous ne sommes que trois à être là depuis 24 ans : Sylvie Grumbach (2ème Bureau des relations publiques du festival), Jean-François Leroy et moi ! ».
Le photographe Xavier Zimbardo, organisateur du Festival de la photographie sociale à Sarcelles est en grande discussion avec Pascal Briard de Canon France sur les mérites des Canon G12 et GX devant l’objectif 18/300 Nikor du Nikon D7000 de Geneviève Delalot !
« Je vais bientôt partir à Madagascar pour la Fondation Raoul Follereau » confie Corentin Fohlen, tandis que Ludivine Gaudry de l’agence News Picture essaye de convaincre au téléphone Michel Chicheportiche, son patron, de bien vouloir « descendre à Perpignan » .
Annie Boulat est arrivée, son stand est déjà prêt, tandis que Jean-Pierre Pappis, d’habitude un des premiers arrivés, ne gagnera la capitale catalane que dans la soirée en provenance de l’aéroport de Barcelone.
Autour de Patrick Chauvel s’est groupée une poignée de jeunes photographes français et belge. Patrick Chauvel n’est pas avare de conseils. A celui qui veut partir en Palestine, il conseille de s’installer en Israël. « Surtout sers toi de tes oreilles ! Un char dont le moteur change de régime ça veut dire qu’il va bouger et sûrement tirer… Et ça démarre comme une Ferrari ces machins là. Ne prends jamais la place d’un combattant qui vient de tirer, sinon c’est toi qui va écoper de la bastos qui lui était destinée. » Les jeunes hochent la tête, remercient respectueusement l’ancien. « J’ai eu envie de faire se métier après avoir lu ton livre. » conclut l’un.
Lundi 3 septembre
8h00 – Café, lecture de l’Indépendant de Perpignan, le quotidien traite du « régional de l’étape » : Julien Goldstein et du Kurdistan « à la découverte d’un pays qui n’existe pas ».
Normal, le photographe de Getty Images a passé 32 ans à Montpellier. .
10h00 – Palais des Congrès, première conférence. Caroline Laurent-Simon reçoit Jean-Louis Fernandez, le photographe de scène, le passionné de spectacles vivants qui a immortalisé tant de metteurs en scènes, d’acteurs et de danseurs. Une exposition « Intimité » présente son travail au Théâtre de l’Archipel. Passionné et passionnant, il a envie de faire des photos depuis l’adolescence, mais ne pensait pas arriver à en vivre. Depuis quinze ans, il fait également partie du comité de sélection des images projetées au Campo Santo. J’en reparlerai quand j’aurai vu son exposition.
11h00 – Doug Menuez et sa « révolution numérique », un travail qui l’a accaparé quinze ans. Il dit, à un moment, j’étais comme eux « carbonisé par le boulot » ! En réponse à une question sur le financement de ce travail, il dit : « pour faire des photos, j’ai fait quand j’étais jeune tous les métiers : vendeur de cornets de glace, ramasseur d’ordures ménagères… » Dans la Silicon Valley, il offrait des photos aux sociétés qui lui fournissaient un laissez passer pour photographier ce qu’il voulait, mais il conservait ses droits pour toutes les publications. « A un moment, toutes les sociétés de la vallée voulaient que je travaille pour elles. » Il ajoute : « je me demande parfois quand j’en aurai fini avec ce travail ! » Aujourd’hui, il a commencé un travail sur le Brésil. Nous convenons de prendre le café ensemble mardi matin pour … vous en parler.
12h00 –Au « Divil » rue Fabriques Nabot, du nom d’un atelier de drapiers installé là au XIIème siècle, je tiens à goûter au « tartare au couteau » et à la crème catalane maison. Surprise Jean-François Leroy est installé à une table en charmante compagnie. Il y a sa directrice-adjointe, Delphine Lelu, et deux jeunes femmes… Mais bon sang, c’est bien sûr Nichole Desrosiers, la nouvelle vice-présidente de Getty Images avec son tatouage d’arbre en haut du dos !
21h00 – Première soirée de projection. On me dit qu’elle ne sera pas « comme un lundi »…
Michel Puech pour le texte avec Geneviève Delalot pour les photos
A lire et à voir
- Tous les billets d’A l’oeil sur Visa pour l’image
- Portfolio de Mediapart sur Visa pour l’image
- La « couverture » la plus complète de Visa pour l’image est dans « Le Journal de la Photographie »
Pratique
- Expositions – du samedi 1er au dimanche 16 septembre 2012
- Semaine professionnelle – du lundi 3 au dimanche 9 septembre 2012
- Soirées de projection – du lundi 3 au samedi 8 septembre 2012
- Transmission pour l’image – du lundi 3 au mercredi 5 septembre 2012
- Semaine scolaire – du lundi 17 au dimanche 21 septembre (sur rendez-vous)
- Toutes les informations sur le site de Visa pour l’image – Perpignan
Dernière révision le 3 mars 2024 à 7:22 pm GMT+0100 par Michel Puech
- Marius Bar
Les chantiers navals de « La Mecque » - 20 décembre 2024 - PSnewZ
De la liquidation de Panoramic,
à la création d’une nouvelle agence photo - 13 décembre 2024 - Affaire Bernard Faucon
La fin de l’omerta dans le milieu de la photo ? - 6 décembre 2024