Endre Ernő Friedmann, connu sous le pseudonyme de Capa, est né le 22 octobre 1913 à Pest (Hongrie) sous le signe du « Buffle d’eau » dans l’astrologie chinoise, ce qui est quand même troublant pour un homme mort le 25 mai 1954 dans les rizières indochinoises. Fiction.
Bayeux, octobre 2013
Il est là, mais personne ne l’a vu.
Il y a pourtant, sur la côte Normande, une centaine de correspondants de guerre. Un vrai débarquement.
Mais, en ce dimanche de clôture des Rencontres de la 20ème édition du Prix Bayeux-Calvados, Jean-Pierre Perrin (Libération) a accroché son magnifique Burberry à la patère de l’Hôtel de la Marine. Il a le nez dans un plat d’huîtres et de bulots.
Patrick Chauvel (photographe freelance) est allé glisser quelques pièces dans le parcmètre, pas question qu’on lui enlève sa Mustang blanche. Patrick Baz (AFP) et Thomas Haley (freelance ex-Sipa) fument dignement d’énormes cigares dans la bruine mêlée d’embruns. Benoît Schaeffer (freelance) discute des mérites du dernier modèle de Nikon.
James Nachtwey a disparu à la recherche d’une chemise blanche et, pour cause d’un nouveau mariage, John G. Morris, l’éditeur des photos du D-Day de Capa, est en Amérique.
Dommage…
Là-bas, sur la plage, une frêle silhouette
Car, là-bas, sur la plage, une frêle silhouette, néanmoins élancée, semble se battre autant avec les flots qu’avec le vent, soutenue par une jeune et jolie jeune femme. Plus le couple se rapproche, plus leurs visages me disent quelque chose. …
Quand ils arrivent au quai, je sais que je tiens mon scoop !
– Excusez-moi, Monsieur, vous êtes bien le célèbre Robert Capa ?
– …
– « Parlez plus fort » me dit la jeune femme, » il est un peu sourd. »
– Je hurle dans le vent : T’es bien Capa pépé ?
– « Ya » me répond le grand reporter en javanais, car il parle plusieurs langues.
– Pourquoi êtes-vous venu ici ?
– « Je suis venu fêter… » Il se tourne vers la jeune femme. « Qu’est ce que je suis venu fêter ? »
– « Ton centenaire mon chéri » répond la belle.
– « Ah oui ! Je suis venu fêter les 70 ans de mon débarquement » enchaîne Bob
– Mais ce n’est que l’an prochain ! rétorque-je.
– « Eh, jeunot, tu crois que je suis copain avec Alzheimer … L’an prochain, il y aura trop de monde et je n’aurai aucune chance de retrouver le Burberry que j’ai perdu le 6 juin 1944. »
– Que pensez-vous de l’évolution du photojournalisme ? Qu’est-ce qui a changé par rapport à votre époque ?
– « Mais rien mon gars ! Les patrons de presse sont avant tout des patrons. Ils essaieront toujours de payer nos photos le moins cher possible, sauf évidemment quand on ramène des images incontournables et qu’ils sont pressés de publier. Il faut toujours se battre et faire parler de soi…
– Faire parler de soi ?
– « Sans Gerda (ndlr : Gerda Taro sa compagne morte en Espagne), je serai peut-être resté Friedmann, un petit photographe juif hongrois. »
– Vous suivez toujours l’actualité ? Iriez-vous en Syrie en aujourd’hui ?
– « La guerre c’est comme une actrice qui vieillit : de plus en plus dangereuse et de moins en moins photogénique. »
– Avez-vous raté quelque chose dans votre vie ?
– « Bien sûr ! En tant que photographe de guerre, j’espérais rester au chômage jusqu’à la fin de ma vie… C’est raté ! Heureusement que je suis mort à 40 ans. «
A ce moment une détonation a retenti.
Le couple s’évapore… Apparemment autour de moi personne n’est blessé. Ce n’est que le bouchon d’une bouteille de champagne… Celle d’un Magnum bien entendu !
Michel Puech
Pour aller plus loin
Le dossier de Libération pour l’anniversaire de sa naissance
Site officiel du Prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre
Le dossier de l’INA avec en particulier l’annonce à la radio de sa mort
Dernière révision le 26 mars 2024 à 5:00 pm GMT+0100 par Michel Puech
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