
La Normandie s’apprête à célébrer le 70ème anniversaire du 6 juin 1944. Un débarquement à jamais immortalisé par Capa, mort dix ans plus tard, le 25 mai 1954, dans une guerre trop oubliée, celle de l’Indochine.
Ici et maintenant, à Bayeux en Normandie, le débarquement est le mot du moment. Les hôtels sont pleins et la rue est «alliés » et « ennemis » mixée. L’anglais et le français se conjuguent parsemés d’allemand et autres.
Bayeux honore les combattants, professe la paix mais aussi la liberté de la presse. La ville et le département réunissent chaque année les correspondants de guerre pour honorer les auteurs des meilleurs reportages.
Il fait un temps splendide ce samedi 17 mai 2014, quand le taxi se gare Boulevard Fabian Ware devant le Mémorial des reporters de guerre de Bayeux. Deux adolescents de 97 et 88 ans en descendent: John et Pat sa compagne. Ils sont rejoint par Sonia K. Fry executive director de l’Overseas Press Club of America – un club fondé à New-York en 1939 par des correspondants de guerre pour promouvoir l’exigence dans le journalisme – et par Dominique Dechavanne, directrice du bureau de Paris de l’agence Contact Press Images.

L’homme du taxi, c’est John Godfrey Morris né en 1916 à Maple Shade, New Jersey (USA), une légende pour les professionnels du journalisme. C’est lui qui a édité les images du pool de photoreporters envoyé par Life pour « couvrir » le débarquement des troupes alliées.



C’est lui, qui a sélectionné les photos de Robert Capa, rescapées d’un accident de laboratoire. Mais, plus qu’une légende, c’est une bibliothèque vivante, un concentré de savoir sur un siècle de photojournalisme . Un trésor vivant.
Pat, Sonia, Dominique et John se sont donné rendez-vous à Bayeux à l’occasion de la conférence que John a donnée la veille au Mémorial de la Bataille de Normandie pour la sortie de son ouvrage « Quelque part en France ».
Mais ce samedi matin, l’objectif du groupe est une petite stèle que l’Overseas Press CLub of America a fait installer dans le Mémorial des reporters.
Et en ce mois anniversaire de la mort de Robert Capa, la petite bande est venue déposer quelques fleurs en souvenir du reporter mort trop jeune.
En 1954, John G. Morris dirige Magnum Photo. A ce titre, il représente à New York les intérêts de Capa alors en reportage au Japon. Lors d’un déjeuner, Ray Macklande, de Life, demande à Morris si Capa pourrait remplacer durant un mois un autre photographe sur le front de la guerre, raconte John G. Morris dans « Best images », en français « Des hommes d’images », son livre mémoire.
« Mackland proposait un salaire garantie de deux mille dollars (1), plus les frais, pour la période en question. J’interrogeai Capa par télégramme, convaincu – ou espérant –qu’il refuserait. » Capa est indécis. « Pourtant le lendemain matin, 30 avril (1954), Capa me répondit par télégramme qu’il acceptait l’offre de Mackland ! Ce soir là, à Armonk, je repensais avec horreur aux dangers auxquels nous avions échappé en France. Pour finir je décidais de l’appeler à Tokyo. La ligne était mauvaise : « Bob ! hurlai-je . Tu ne vas pas y aller ! Ce n’est pas notre guerre ! » « Ne t’inquiète pas ! me répondit-il en s’époumonant aussi. Ce n’est que quatre semaines. »
Hélas, la troisième semaine fut fatale à Endre Friedmann dit Robert Capa.
Michel Puech
(1) 2000 dollars US de 1954 équivallent à 2200 euros de 2014
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Références
Get the Picture: A Personal History of Photojournalism. Autobiographical Book by John G.Morris. First Edition, Random House,1998. Traduit en français sous le titre « Des hommes d’images, une vie de photojournalisme » Editions de La Martinière 1999.
Quelque part en France de John G. Morris, conception Robert Pledge, éditions Marabout 2014
Liens
Site officiel de l’agence Contact Press Images : http://www.contactpressimages.com/
Site officiel de l’Oversea Press Club of America : https://www.opcofamerica.org/
Mémorial des reporters sur le site du Prix Bayeux-Calvados: http://www.prixbayeux.org/?p=100Dernière révision le 26 mars 2024 à 5:18 pm GMT+0100 par
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