Il y a un an, le 28 juillet 2013, je suis interpellé sur Facebook : « Je m’appelle Mylène Zizzo, je suis photographe, et j’habite La Ciotat. Je voudrais vous soumettre mon reportage… et je serai à Perpignan pour Visa pour l’image. »
Comme d’habitude, il faisait chaud en septembre 2013 au Palais des congrès de Perpignan quand je rencontre pour la première fois Mylène Zizzo. C’est une jeune femme souriante qui sait ce qu’elle veut. Ne s’impose pas, mais arrive à ses fins.
Dans un bar, elle me montre le début de son reportage en Ethiopie sur les « Effacés du monde ». Reportage réalisé en collaboration avec l’association humanitaire Project Harar ». Cette association travaille sur une maladie peu connue en Occident : le noma.
C’est une maladie qui sévit dans les zones les plus pauvres du monde et qui touche environ 1400 enfants par an. Le noma nécessite une prise en charge dès les premiers symptômes sans quoi il risque d’entraîner la mort pour 80 % des victimes. Les 20% restantes vivent avec un visage meurtri et un traumatisme important.
Cette terrible maladie défigure les enfants et rend les prises de vue délicates. Que ce soit en Ethiopie ou au Burkina Faso, Mylène Zizzo cherche à montrer non seulement les ravages de la maladie, mais aussi – surtout – à montrer l’étrange mélange de douleur et d’amour des mères.
En final des portraits poignants qui lui ont valu lors de son premier Visa pour l’image, un coup de cœur de l’Association Nationale des Iconographes (ANI). Un reportage remarqué également par Raymond Depardon, rédacteur en chef d’un numéro collector de Réponses Photo, qui le publie sur quatre pages. « Un grand moment de bonheur » commente Mylène Zizzo.
C’est ensuite le SOPHOT qui sélectionne son travail pour une exposition à la galerie Fait & Cause à Paris. Mylène Zizzo enchaîne avec une exposition dans le OFF des Rencontres d’Arles. Et puis, comme souvent, quand la chance sourit aux audacieux, Mylène Zizzo est honorée par la Bourse du talent avec une exposition à la BNF à la clé !
Une ambitieuse modestie
« Je veux témoigner aussi du courage de ces enfants et de leurs familles. Et je veux également mettre en lumière l’engagement des médecins au travers de l’action chirurgicale et réparatrice dans les salles d’opération. »
L’humain, le regard des gens, voilà ce qui passionne cette fille d’ouvrier née à La Ciotat, ce petit port provençal longtemps l’un des grands chantiers navals de ce pays, aujourd’hui devenu une cité touristique.
C’est le dessin, qui va, dans un premier temps, amener Mylène à la photographie. « Je dessine depuis toute petite… Je faisais des portraits, des regards, des émotions d’après des photographies que je prenais dans Géo. »
Après des études en langues et en ethnologie, Mylène part pour Madagascar. « On me l’avait conseillé comme initiation au voyage ». Elle emporte son équipement de dessin et s’achète un appareil photo analogique pour faire des clichés. « Quand je dessinais d’après les photos des autres, j’avais l’impression de voler le photographe et de ne pas faire un travail complet. »
Au retour, Mylène Zizzo développe ses films et là, c’est le choc, elle décide de devenir photographe. On est en 2003, elle a 22 ans, elle ne sait pas encore comment elle va s’y prendre, mais elle a décidé de son avenir.
Elle expose ses photos de Madagascar sur les quais de La Ciotat. L’expo dure trois mois. Les retours sont nombreux et encourageants. Elle part à Londres pour apprendre l’anglais et fait une « petite formation » au London College of Art « où j’ai appris à raconter une histoire en photo. »
Et en 2007, elle enchaîne sur une formation à l’EMI-CFD qui « me confirme que la photographie sera mon outil pour raconter le monde. »
Parallèlement elle développe une activité commerciale autour du portrait, alterne entre commandes de reportages (Médecins du Monde, Conseil Régional PACA, agence Réalis, CCI du Var) et travaux personnels autour de problématiques sociales et humanitaires.
En 2012, Mylène Zizzo a réussi « à vivre de ma photographie », comme elle dit. « C’est le moment de sauter le pas, j’ai la trentaine, pas d’enfant, pas de mari… C’est maintenant. Et c’est là que je suis partie en Ethiopie commencer ce travail sur le noma. »
Réaliste, volontaire, souriante, Mylène Zizzo est ravie de l’accueil que son sujet a rencontré cette année. Elle est en Arles où vous pouvez voir son travail, elle sera également à Visa pour l’image en septembre avant un nouveau départ en reportage, une commande. On en reparlera.
Michel Puech
Expositions
- Du 4 juin au 19 juillet 2014 à la galerie Fait & Cause – 58, rue Quincampoix 75004 Paris avec Jérôme Deya
- Exposition collective du 5 au 27 juillet 2014 : Serge Assier, Arnold Jerocki, Robert Rocchi et Mylène Zizzo, à la Maison de la vie associative d’Arles. (Bât des Photo Folio Review) 3 Boulevard des Lices, 13200 Arles
- Exposition et projection aux Nuits photographiques de Pierrevert dans le Lubéron 25 au 27 juillet 2013
Liens
http://www.mylenezizzo.eu/fr/accueil.html
http://sophot.com
http://www.wostokpress.com/en/reports/detail/page:3
http://www.pierrevert-nuitsphotographiques.com/
Dernière révision le 21 août 2024 à 11:58 am GMT+0100 par Michel Puech
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