Jusqu’au 28 décembre 2014, à la galerie La Grange, entre Chambéry et Grenoble, on peut voir d’étonnants paysages tibétains par un photographe plus connu pour ses portraits.
« Après une douzaine d’années de pérégrination dans les contrées himalayennes et quarante ans d’une vie de reporter photographe catalogué dans le registre photographe social, humaniste, au cours de mon dernier séjour dans l’Himalaya, le paysage s’est imposé. » écrit Christian Rausch dans l’introduction au catalogue de l’exposition.
C’est un choc, pour ce photojournaliste que j’ai connu au début des années 70 alors qu’il œuvrait pour l’Agence de Presse Libération (APL) de Maurice Clavel et Jean-Claude Vernier, que j’ai retrouvé comme coopérateur à l’agence de presse Fotolib, la première agence photo du quotidien Libération, et qui fut l’un des artisans de l’agence Viva, La Compagnie des Reporters.
Mais des confins de la Gauche Prolétarienne à ceux du Tibet, il y a un lien : l’exigence. Marie-Florence Bennes et Christian Rausch ne sont pas de ces occasionnels pérégrins qui traversent chaque année une contrée nouvelle.
« Béni soit « cela » qui m’a préservé des routes banales, qui m’a fait gravir les Himalayas et ces invisibles Himalayas de la pensée si infiniment plus élevés que les autres! » Alexandra David-Néel 1912
Depuis longtemps, ils arpentent – on pourrait dire qu’ils labourent – le Tibet avec en tête une certaine idée de la vie humaine, une curiosité certaine toujours insatisfaite mais qu’ils transmettent à travers articles, livres et expositions.
« Au fil de mes voyages, j’ai appris à côtoyer le bouddhisme tibétain. J’ai été touché par la plénitude de ses pratiquants. J’ai appris à percevoir qu’ils vivent leur philosophie du lever au coucher » poursuit Christian Rausch.
Il a donc beaucoup photographié les hommes, fidèle en cela à une certaine philosophie photographique que l’on trouve à Rapho, agence qui diffuse ses images depuis 1986.
Mais, « cette fois, je me dis que les paysages sont aussi porteurs du sacré, ce sacré que vivent les peuples de culture tibétaine. Je ne suis pas le premier ni le seul à avoir ressenti cette impression face aux paysages himalayens » précise modestement le photographe.
Pour moi, qui connais bien le travail de Christian Rausch, cette exposition a été également un choc. Nos années d’amitié sans faille sont peuplées d’images de manifestations d’abord, puis de voyages. Mais le plus souvent les portraits de femmes et d’hommes dominaient sa production. Des paysages ? Je dois réfléchir. Un petit chemin qui part dans le lointain dans la région de Dreux, un petit arbre tout sec planté dans le sable du désert libyen et qu’il a placé au centre d’un cadre doré, amené spécialement de Paris, comme pour en faire un objet de musée, quelques paysages de Vanoise, puis plus tard, déjà, d’Himalaya… Mais toujours, le paysage cherchait à encadrer l’homme.
Cette fois, durant un long trek entrepris au printemps qui a conduit le couple très souvent à plus de 5000 mètres dans un univers minéral, Christian Rausch s’est laissé aller à photographier la matière. J’allais écrire l’essence de la matière, mais peut-être est-ce plus justement dit ainsi.
L’homme qui, la soixantaine passée, a dû affronter récemment les douleurs communes à cet âge, perte d’êtres chers, ennuis de santé propres à l’usure des corps, semble avoir cherché dans l’obsédante minérale présence des hautes altitudes à donner à son œil un peu de cette sérénité que les moines cultivent avec obstination.
Et il a réussi à mettre sous nos yeux, des images qui incitent à la réflexion et pourquoi pas à la méditation.
Michel Puech
Pour aller plus loin
Ecoutez l’interview de Christian Rausch par Michel Puech pour WGR, la radio des grands reporters et des écrivains voyageurs. (prochainement en ligne)
- Site de l’exposition :
- Catalogue de l’exposition :
- Site de Marie-France Bennes et Christian Rausch :
- Livre: Tibétains, peuple du monde de Marie-Florence Bennes et Christian Rausch (Photographie) – Beau livre (relié). Paru en 01/2010
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Dernière révision le 29 mars 2024 à 4:11 pm GMT+0100 par
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