Directrice des services photo du Figaro Magazine et de Ça m’intéresse, Brigitte Huard, une personnalité du monde du photojournalisme née le 8 janvier 1946 à Angers, est décédée lundi 25 mai 2020 à 74 ans.
Elle avait flirté avec la mort en 2009 à Perpignan, le premier jour du Festival de photojournalisme Visa pour l’image. « Je l’ai trouvée en sang » se souvient Jean-François Leroy. « J’étais tellement choqué que c’est la seule fois où je n’ai pas présenté la soirée au Campo Santo. » Rescapée miraculeusement d’un terrible accident cardiaque et d’un séjour dans le coma, Brigitte Huard avait retrouvé – tant bien que mal – son énergie et sa bonne humeur.
C’était une habituée de Perpignan où elle siégeait dans des jurys, notamment dans celui du Prix Canon de la femme photojournaliste. Une idée qu’elle avait eue en 1998 ou 1999 avec Lizzie Sadin. Toutes deux étaient alors membres de l’Association des femmes journalistes (AFJ) dont Isabelle Fougère était la présidente. « Je me souviens que nous avions présenté le projet au Palais des Congrès en 2000. Un tiers de la salle avait hurlé contre l’idée, un tiers avait approuvé. » se souvient Isabelle Fougère. En 2008, invitée par Floris de Bonneville, Brigitte Huard participe à la création du premier festival mondial de photojournalisme en Chine, les Tops de Shenyang.
Mais l’essentiel de sa carrière se résume en deux titres, le Figaro Magazine où elle arrive peu après la création en 1978, y reste jusqu’en 1984 avant de passer à Ça m’intéresse, le magazine scientifique du groupe allemand Prisma. C’est pour ces deux magazines qu’elle fera travailler nombre de photographes à une époque où les rédactions ont de l’argent. Ils sont nombreux à s’en souvenir, souvent avec mélancolie, parfois avec des sentiments mitigés. Dans le monde du photojournalisme, les caractères sont souvent abrupts. (Lire l’hommage de Jean-Pierre Laffont)
A l’époque où je dirigeais La Compagnie des Reporters, au début des années 1980, je me souviens parfaitement lui avoir fait signer un bon de 40 000 Francs (15 000€) pour une photographie N&B de chars russes dans la banlieue de Varsovie faite par Pierre Perrin. Elle avait chauffé à blanc Louis Pauwels sur le thème « les russes vont intervenir cette semaine » ! Michel Sola de Paris Match, qui n’avait pas voulu mettre autant d’argent sur la table, enverra le lendemain Henri Bureau refaire la photo. Tous les coups étaient permis à cette époque. Brigitte n’avait pas apprécié « la grimpette [1] » : « Ne me fais plus jamais ça ! » m’avait-elle dit furieuse.
Les années avaient passé, Brigitte était à la retraite, et nous nous retrouvions toujours avec plaisir à Perpignan sur le stand de Polaris Images où Sylvie et Jean-Pierre Pappis nous accueillaient, et nous réunissaient.
En septembre prochain, pour le prochain curieux Visa pour l’image, Brigitte ne sera plus là !
Michel Puech
Lire l’hommage de Jean-Pierre Laffont
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[1] Grimpette, jargon du photojournalisme, terme inventé par Michel Sola selon Alain Dupuis, commercial de Sygma, pour désigner l’action de faire monter les enchères entre deux magazines pour un reportage – Entretien avec Alain Dupuis.
Dernière révision le 8 octobre 2024 à 1:28 pm GMT+0100 par
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