En 1898, Frank Rinehart est mandaté par le gouvernement pour photographier l’exposition internationale Trans-Mississippi à Omaha, dans le Nebraska, et le Congrès indien qui se tenait dans ce cadre.
À cette époque, les Amérindiens étaient considérés comme un peuple dont le mode de vie était en voie de disparition et n’étaient plus vus comme des ennemis à craindre. Le but des promoteurs du congrès était de présenter une vaste exposition illustrant le mode de vie, les activités et les caractéristiques ethniques du plus grand nombre possible de tribus autochtones. À cette fin, il fut proposé de réunir des familles ou des groupes sélectionnés de toutes les principales ethnies et de les faire camper dans des tentes sur le site de l’exposition. On leur permit de mener leurs activités domestiques et de fabriquer et vendre des marchandises pour leur propre profit.
Apaches, Arapahos, Assiniboines, Pieds-Noirs, Cheyennes, Crows, Kiowas, Sioux et autres tribus étaient représentés, le contingent le plus important étant celui des Sioux avec la présence du chef Red Cloud, âgé de 80 ans et aveugle. Geronimo, le célèbre guerrier apache, officiellement emprisonné mais autorisé à assister à l’événement, était également là mais sous la surveillance constante de soldats américains. Dans un studio installé pour l’occasion, 500 Amérindiens de 35 tribus vont défiler devant l’objectif de Rinehart et son assistant Adolph Muhr, ce dernier réalisant la plupart des images. Leurs portraits montrent la dignité de leurs sujets, loin des conventions considérant les Indiens comme des sauvages ou des curiosités.
L’ensemble constitue un riche témoignage
sur la vie et la culture amérindienne à l’aube du XXe siècle
Tom Southall, ancien conservateur de la photographie au Spencer Museum of Art de l’Université du Kansas, a dit de ces images : « La beauté dramatique de ces portraits est d’autant plus impressionnante qu’ils s’éloignent des photographies antérieures, moins sensibles, des Amérindiens. Au lieu d’être des documents ethnographiques détachés, les photographies de Rinehart sont des portraits d’individus mettant l’accent sur la force de l’expression. Bien que Rinehart et Muhr n’aient pas été les premiers photographes à représenter des sujets indiens avec autant de dignité, ce vaste corpus d’œuvres qui a été largement vu et distribué a peut-être eu une influence importante sur les représentations ultérieures des Indiens d’Amérique. »
Les ventes de ces photographies rendront Frank Rinehart célèbre, et lui donneront les moyens nécessaires pour faire, toujours accompagné d’Adolph Muhr, un grand tour des réserves indiennes, où ils réaliseront 1 200 portraits supplémentaires. Muhr deviendra plus tard, l’assistant d’un autre photographe connu pour avoir également documenté les Amérindiens, Edward S. Curtis.
Gilles Courtinat
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