S’il est surtout renommé pour ses images de mode qu’il a réalisées pour les magazines américains Vogue et Harper’s Bazaar, l’exposition, qui lui est consacrée à Paris, au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, a l’intérêt d’élargir la vision à d’autres productions moins, voire pas du tout connues de ce photographe au talent protéiforme.
Né à Berlin, Erwin Blumenfeld pratique la photographie dès l’âge de 11 ans. Il s’installe en 1923 aux Pays-Bas et profite d’un voyage aux Saintes-Maries-de-la-Mer pour photographier les gitans, travail qui ouvre le parcours de l’exposition. Il arrive à Paris en 1936 sans un sou où il fera des portraits et travaillera pour le nouveau musée de l’Homme, inauguré au Trocadéro.
Il explore les ressources de la prise de vue et du travail de laboratoire dans une recherche permanente d’innovation. Introduit par la fille du peintre Georges Rouault dans le milieu artistique, sa carrière va peu à peu décoller surtout quand Cecil Beaton le présente au rédacteur en chef de Vogue avec qui il commence à collaborer, obtenant également en août 1939 un contrat avec Harper’s Bazaar.
Mais la déclaration de guerre un mois plus tard et sa nationalité allemande font de lui un « étranger indésirable » et entrainent pour lui et sa famille une longue période d’errance douloureuse. Interné dans plusieurs camps, ils finissent par être libérés mais, mis en péril par leur statut de juifs, n’ont de cesse que de trouver les visas nécessaires pour émigrer aux Etats-Unis.
Ce sera chose faite en août 1941 où ils arrivent à New York, Blumenfeld reprenant sa collaboration avec Harper’s Bazaar puis avec Vogue va devenir un des photographes de mode les plus influents de sa génération, porté par le dynamisme de la presse et la montée en puissance de la photo couleur, il invente avec audace un style très novateur qui lui est propre et sa créativité va faire de lui un photographe reconnu et sollicité.
Cependant, sa radicalité et sa volonté d’indépendance le mettent mal à l’aise avec la volonté des directeurs artistiques et les intérêts commerciaux de ses clients, son esprit critique le poussant à rompre avec eux en 1955. Tout en poursuivant sa carrière, notamment en collaborant pour la publicité, il se consacrera à sa biographie achevée en 1969 mais qui ne sera publiée qu’à titre posthume.
L’exposition balaye cette histoire féconde et revient également sur son travail personnel sur le corps féminin, ses références à l’histoire de l’art et des grands maîtres pour se clore sur des images très peu connues de cérémonies amérindiennes au Nouveau Mexique.
« J’étais un amateur, je suis un amateur, et j’ai bien l’intention de le rester. Pour moi, un photographe amateur, c’est quelqu’un qui adore prendre des photos, un esprit libre qui peut photographier ce qu’il aime et qui aime ce qu’il photographie. Selon cette définition, je suis un amateur, et donc c’est cette définition que j’adopte. » (Interview dans Popular Photography, septembre 1958)
Site de l’Estate of Erwin Blumenfeld
Les Tribulations d’Erwin Blumenfeld, 1930-1950
Jusqu’au 5 mars 2023
Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, 71 rue du Temple 75003 Paris
Site web du muséeDernière révision le 9 octobre 2024 à 9:59 am GMT+0100 par
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