A Alençon (Orne) jusqu’au 6 novembre 2022, sur les grilles extérieures de l’Hôtel du Département, 27 boulevard de Strasbourg, on peut découvrir le reportage photographique d’Emmanuel Ortiz sur la guerre en Ukraine.
« Ecouter beaucoup, se tromper un peu. Savoir que l’on n’est pas chez soi, et que personne ne vous a demandé de venir ; dans beaucoup de cas, si vous repartez tout de suite, c’est mieux. Demander à comprendre, regarder autour de soi comment ce monde bouge, trouver l’attitude juste pour rester, être toléré, sans s’imposer, savoir s’effacer, savoir quand il faut partir. Pouvoir revenir. Ecouter c’est voir, photographier c’est écrire des notes. Un reportage est un brouillon fébrile, rédigé en lumière, qui sera vu en silence ».
Cette belle définition ne peut être écrite qu’après des années d’expériences sur divers terrains. Emmanuel Ortiz est un photojournaliste français, né en Argentine à Buenos Aires en 1961. Il revient en France en 1978 et fait son service militaire en 1980 en Allemagne alors que le mouvement des ouvriers de Gdansk fait trembler le pouvoir soviétique.
Il débute en photographie en 1983, « par hasard », en photographiant des artistes dans les squats parisiens puis devient pigiste pour Reuters, puis Associated Press et l’Agence France Presse pour lesquelles il couvre l’actualité de l’Amérique latine.
Dans les années 90, il devient l’un des membres du groupe de photojournalistes qui couvrent les conflits dans l’ex-Yougoslavie, en particulier le siège de Sarajevo. Photographe indépendant, il participe à peu d’agences de presse, un bref passage à Wodstok, puis quelque temps diffusé par Corbis avant de rejoindre Divergence Images, et de confier ses archives à AKG Images.
« Je suis allé en Ukraine en février de cette année (2022), conscient que nous étions bien là devant un moment capital de l’Histoire. Pas le temps de chercher une commande d’un magazine, il est depuis bien longtemps impossible d’en obtenir. Pourtant je me devais d’être là. J’y ai réalisé la fulgurante avancée de la technologie qui s’affrontait au maelström de la guerre »
En Ukraine, il reste jusqu’au 19 mars 2022, circulant d’Irpin à Kiev puis Odessa « où il n’y avait personne ». Entendez : pas de confrères. En Ukraine, un des problèmes est que les distances sont énormes… Et puis, c’était le début, ils ne savaient pas comment faire avec la presse. Ensuite nous étions censés avoir un officier de presse pour surveiller ce qu’on photographiait… Agréable ! Il y a un vieux truc dans les pays de l’Est : l’étranger est toujours un espion… En plus il n’y avait rien à manger : j’ai perdu 8 kg en trois semaines. » confie le reporter.
Et puis, au retour, pour ce baroudeur, cet « ovni du métier » comme le qualifie Jean-François Leroy, cet habitué des commandes de Stern, de Time, du New York Times n’a aucune parution ! « Pas un quart de page » dit-il sans amertume. « Heureusement l’exposition me permet de rentrer un peu dans mes frais. » dit-il avant d’ajouter « Mais, plus on parle, moins on en dit… »
Site officiel d’Emmanuel Ortiz
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