« L’usage du monde » publié en 1963, est passé inaperçu pendant plusieurs décennies avant que Michel Lebris ne consacre Nicolas Bouvier comme écrivain voyageur. Depuis on ne cesse de revenir sur l’œuvre de ce suisse iconoclaste auquel, aujourd’hui, un autre suisse, Alexandre Chollier, rend hommage aux Editions Paulsen.
La Suisse présente l’image d’un pays bien policé et tranquille où on mange du chocolat, on porte des montres très chères, on fait du ski en mangeant de la fondue et où le secret bancaire est une religion. Pourtant certains de ses ressortissants ont jugé bon de rompre avec cet univers un peu trop douillet à leur goût pour aller voir ailleurs si le monde continuait de tourner au delà des rives du lac Léman. Citons parmi ces baroudeurs Jean-Pierre Vuillomenet et Claude Marthaler qui furent parmi les premiers à faire le tour du monde en vélo ou l’explorateur et inventeur du bathyscaphe Jacques Piccard digne rejeton de son père Auguste qui avait réalisé en 1931 la première ascension en ballon dans la stratosphère à plus de 15 000 mètres d’altitude.
Dans cette famille de baroudeurs magnifiques, il y a aussi Nicolas Bouvier qui fut iconographe, à une époque où ce métier n’existait pas vraiment, journaliste, photographe et est surtout connu comme écrivain voyageur. Nourri dès son enfance par de grands récits d’aventure, il rêvera très tôt de tailler la route. Ses premières escapades le mèneront en Laponie et au Sahara et en 1951, à 24 ans en compagnie de son ami Thierry Vernet, il part sur la route au volant d’une petite Fiat vers la Yougoslavie, la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan, le Pakistan.
« On croit qu’on va faire un voyage,
mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait. »
De ce périple naitra plus tard « L’usage du monde », ouvrage devenu aujourd’hui un grand classique de la littérature de voyage. Après un an et demi les deux amis se séparent, Vernet part rejoindre sa fiancée à Ceylan alors que Bouvier tente sans succès de gagner la Chine en passant par l’Inde pour finalement rejoindre Ceylan où l’attendent ses amis. Malade et déprimé, il y restera 7 mois puis poursuivra ensuite vers le Japon où il restera un an y puisant matière à d’autres livres. Tout du long il pratique aussi la photographie faisant la preuve par l’image de son profond intérêt pour les peuples qu’il rencontre au gré de ses cheminements. Revenu au pays, il travaillera comme iconographe, voyagera de nouveau en Asie et en Europe et poursuivra une carrière d’écrivain jusqu’à sa mort en 1998.
Un livre qui retrace cette vie d’incorrigible voyageur vient de sortir aux Editions Paulsen. Riche d’informations, illustré de photos, dessins et documents, l’ouvrage retrace la vie passionnante d’un personnage curieux du monde, qui disait : « Je fais des photographies sans être photographe, et j’écris de temps en temps sans être véritablement écrivain. Je crois que si je devais me prévaloir d’une spécialité j’opterais pour celle de voyageur. Etre l’œil ou l’esprit qui se promène, observe, compare et ensuite relate, une sorte de témoin »
Gilles Courtinat
Nicolas Bouvier, au gré des géographies » d’Alexandre Chollier – Editions Paulsen, 186 illustrations, 224 pages
De Nicolas Bouvier on pourra lire: L’usage du monde, Le poisson-scorpion, Chronique japonaise, Journal d’Aran et autres lieux, Routes et déroutes, L’oeil du voyageur, Le vide et le plein que l’on peut retrouver dans l’édition Quarto de Gallimard.Dernière révision le 9 octobre 2024 à 10:00 am GMT+0100 par
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