Cette exposition rassemble 64 photos noir et blanc, majoritairement réalisées de 1964 à 1966, et baigne dans une ambiance néo-réaliste que renforce encore la musique de Nino Rota en fond sonore.
En 1962, Bruno Barbey n’a que 21 ans et est étudiant en photographie et art graphique à la prestigieuse école de Vevey en Suisse. Le grand éditeur Robert Delpire a lancé la collection Encyclopédie essentielle, où sont parus en 1958 Les Américains de Robert Frank et vient de sortir Les Allemands de René Burri. Ces deux ouvrages ont fait une forte impression sur le jeune photographe qui entreprend alors de dresser le portrait des Italiens et de « capter par l’image l’esprit d’une nation. » Cette affinité pour ce pays vient du fait que, quand il était pensionnaire au lycée Henri IV à Paris, il faisait volontiers le mur pour aller voir les films italiens projetés à la Cinémathèque. Nourri par cette filmographie, il va à de nombreuses reprises, sur une période de trois ans, sillonner du nord au sud un pays en pleine transformation, avec en tête le projet d’un livre.
« Dresser par l’image le portrait des Italiens était donc l’ambition de ce projet (…) J’ai pour cela sillonné l’Italie du Nord au Sud (…) Rien d’encyclopédique dans ces voyages successifs mais un périple affectif, à l’image d’un pays dont la fantaisie défie toute méthodologie. » Au bout d’un an, il présente son travail à Delpire qui l’encourage à poursuivre et lui apporte une aide financière.
C’est une œuvre magnifique qui montre une Italie qui n’existe plus, servie par une esthétique de haute tenue, des cadrages très maitrisés et la très grande qualité des tirages réalisés par Guillaume Geneste. Les traces de la guerre sont encore présentes mais s’estompent peu à peu et l’Italie se rêve un avenir meilleur. On retrouve dans ces images la religion omniprésente, l’art du bien manger, l’élégance vestimentaire, la fête, les enfants qui jouent dans la rue mais aussi les différences de classe très marquées et la misère qui règne à l’époque dans le sud du pays. Les ragazzi prennent la pose à Rome, une vespa transporte toute une famille à Palerme, des enfants jouent devant un mendiant à Naples, à Gênes une prostituée attend le client. Religieuses, aristocrates, carabiniers, prêtres, vieux mafieux deviennent les personnages d’un théâtre de la vie tout droit sortis de l’univers de Fellini, Visconti, Pasolini, ou De Sica.
Le projet d’édition ne se réalisera pas dans l’immédiat mais va lui permettre de rencontrer Riboud et Cartier-Bresson et, grâce à cela, il va intégrer l’agence Magnum en 1965. Il s’oriente alors pendant dix ans vers le photojournalisme en couvrant les événements de mai 68 à Paris puis les conflits majeurs du XXe siècle. Ensuite, pendant trente ans, il va revenir à une approche semblable à celle qu’il avait en Italie en photographiant, mais cette fois-ci en couleur, le Maroc, pays de son enfance, travail pour lequel il est sans doute le plus connu.
Exposition « Les Italiens, » Bruno Barbey
Jusqu’au 02 juillet 2023
Académie des Beaux Arts, Paris
www.academiedesbeauxarts.frDernière révision le 29 octobre 2024 à 12:17 pm GMT+0100 par
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