Emile Pavani est décédé. C’était un simple photographe d’agence. Un de l’ombre qui capture la lumière des autres, un des « télégraphistes » d’avant, de l’époque du photojournalisme argentique. Nous donnons ici la parole a deux confrères, mais nous reviendrons sur la vie d’Emile Pavani et sur ses photographies. Sincères condoléance à son fils Pascal et à ses amis. La rédaction.
Le dernier de sa génération
par Charles Platiau, photojournaliste Reuters
« Décédé à 99 ans il devait être le dernier photographe de sa génération. D’origine italienne Il a commencé comme coursier pour une revue catholique sous l’occupation puis s’est engagé dans l’armée française et à terminé à Berlin. Il a dirigé le service d’UPI en France. Je l’ai connu il y a 40 ans à l’AFP. A cette époque l’AFP n’avait pas de service international, il y avait donc un accord entre les deux agences, l’AFP cédait a UPI les reportages effectués en France et UPI approvisionnait l’AFP avec sa couverture mondiale. Lorsque Reuter a voulu créer un service photo ils ont racheté UPI ce qui a forcé l’AFP a créer son propre service international. Les pigistes de l’AFP avaient donc l’habitude de faire des commandes spéciales pour les clients étrangers d’UPI, ce qui permettait d’arrondir nos fins de mois. Pavani m’a incité à le rejoindre à Reuters. Il a mis en place tout le réseau de pigistes en province, c’est pourquoi des dizaines de photographes Lui doivent énormément, il avait l’habitude de les appeler tous les jours. Il a couvert beaucoup de tours de France et a surtout couvert toute la révolution iranienne. » Charles Platiau / Reuters
Grande tristesse !
par Jean-Claude Delmas, photojournaliste (ex AFP)
Petit de taille tu étais, mais quelle grandeur d’âme, de coeur, de gentillesse, de simplicité, bien loin des projecteurs. Un ami, un véritable camarade depuis tant d’années ! Celles de UPI Paris, bien avant Reuters.
Compagnon de route sur les routes du cyclisme ou les pistes de ski et même ; la gymnastique, pendant tant d’années ! Que de souvenirs !
Au revoir Émile Pavani, on finira bien par se croiser à nouveau quelque part là-haut avec l’ami Robert Delvac, et quelques autres compagnons des tranchées de l’information.
LE SOUVENIR D’UN AMI
La photo ? Ce jour-là, tous les trois déguisés « en et par » Ilford, photographiés par Michel Lipchitz d’Associated Press, nous couvrions les championnats d’Europe de gymnastique à Strasbourg en 1979… 43 ans déjà !
J’ai connu et sympathisé avec Émile en 1974 lorsque je débutais à l’AFP. Lui-même à cette époque travaillait à UPI, au bureau de Paris. Ils étaient deux ou trois photographes autant que je m’en souvienne dont mon autre grand ami américain Lou Garcia que je retrouverai à l’AFP en 1986 en Amérique du Sud lorsque, accrédité au Vatican, je suivrais les voyages pastoraux du Pape Jean-Paul II. Il était responsable du staff AFP qui récupérait mes films pour développer et transmettre mes photos au fil du voyage et au fur et à mesure des étapes.
Avec Émile, nous avons couvert ensemble de nombreux reportages sportifs sur le territoire français, notamment le cyclisme sur route et sur piste mais également l’athlétisme, la gymnastique, le ski autant que je m’en souvienne. Concurrents certes mais surtout amis car au fil des reportages nous avons sympathisé et nous avions tous les deux une grande estime réciproque. Émile a toujours été un compagnon d’une grande gentillesse, d’une grande simplicité, d’une humeur toujours égale, ne cherchant jamais la « lumière des projecteurs » comme beaucoup de nos confrères aux égos surdimensionnés. Je n’ai pas le souvenir de l’avoir entendu élever le ton, s’énerver dans les bousculades de photographes, critiquer qui que ce soit !
Je pense que c’est justement son tempérament, son caractère très souple, son calme, sa gentillesse qui lui ont permis de vieillir tranquillement jusqu’à presque 100 ans. Grande pensée pour son fils Pascal que j’ai vu débuter il y a bien longtemps au labo de l’AFP avant de devenir photographe comme son père.
LE SOUVENIR D’UNE EPOQUE
À cette époque à la fin des années 70 et début 80, UPI avait déjà beaucoup de problèmes financiers au niveau international face son grand concurrent de toujours, Associated Press. Personnellement, j’ai toujours eu beaucoup de respect pour ces deux agences news américaines internationales et leur grand professionnalisme. A mes débuts en agence news, ce professionnalisme américain a été ma meilleure école quand pour débuter en 1974 à l’AFP puis en 1987 à Reuter’s.
UPI disparaitra fin 1984 après les Jeux Olympiques de Los Angeles où j’étais présent et j’ai vécu de loin les rencontres et tractations dans les grands hôtels. Seul United Press national subsistera ! La plupart des photographes internationaux de UPI seront embauchés pour des postes à l’étranger par l’AFP dont le service deviendra international à cette époque, début 1985 et par Reuter’s qui venait de créer son tout nouveau service photo international.
Émile sera embauché par Reuter’s Paris pour aider Mallory Langsdon, le premier responsable photo à créer la première et très jeune équipe de photographes, pour la plupart anciens pigistes de l’AFP de talent. Je pense à Charles Plateau, Philippe Wojazer, Jacky Naegelen , Novovitch à Paris mais également plusieurs photographes dans les grandes villes de province, Nice avec Gaillard, Marseille avec Pélissier, Bordeaux avec Duvignau, Lyon et Toulouse avec Gille Bouquillon sans oublier Pascal Rossignol à Lille . Tous avec d’anciens pigistes de province issus de l’AFP. Tous ces jeunes photographes de l’époque garderont une grande estime d’Émile Pavani jusqu’à aujourd’hui !
Jean-Claude Delmas
Agence de jadis
Dernière révision le 29 octobre 2024 à 12:17 pm GMT+0100 par