Le 11 septembre vient de célébrer son vingt-deuxième anniversaire. Deux fois 11.
L’aveugle, qui ne l’était pas encore tout à fait, se souvient de cet après-midi-là au sien de la rédaction du Parisien.
Il rentrait d’un déjeuner lorsque, rejoignant son bureau de la rédaction, il fut aussitôt averti qu’un avion, etc. Plan large sur épaisse fumée noire s’élevant d’un des gratte-ciels. Caméra figée comme nous devant le poste de télévision, interrogatifs.
Le second, il ne l’a pas vu surgir de la droite de l’écran. Il a échappé à son champ visuel. C’est le cri d’effroi venant de tous les étages de l’immeuble qui lui a fait en déduire qu’il s’agissait bien d’un double attentat. Il n’a rien laissé paraître, évidemment, mais il a ressenti cette privation d’image en direct comme une sorte de ratage monumental, en de telles circonstances. Et cet angle mort est venu s’ajouter à l’inimaginable livré ainsi « sous nos yeux ».
Alourdissant la peine, petite mort intérieure qu’il porte, en fait, depuis ce jour-là, ce jour où l’actualité, non contente de nous terroriser, a soufflé sur sa flamme vacillante et tout éteint. La lumière, la paix.
Depuis, chaque 11 septembre, c’est cela qui se rappelle à son souvenir en berne : le double choc d’une image insupportable mais invisible. Mauvais moment à passer mais qui n’est pas passé, en fait. Quelque chose s’est cassé, ce sombre mardi de septembre 2001.
Comment regarder le monde quand on a perdu la vue ?
Comment voir où va le monde sans vision ?Dernière révision le 26 décembre 2023 à 11:57 am GMT+0100 par la rédaction
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