Dans notre pays, le mois de novembre c’est traditionnellement le mois de la Toussaint, des célébrations de l’Armistice, de la Sainte-Catherine et de la fête de Notre Dame de la médaille miraculeuse (hé oui!).
A Paris, c’est celui de la photographie et ça se bouscule à l’ombre de la manifestation phare, Paris Photo. Pendant quatre jours, la capitale devient le nombril du monde de l’image photographique : expositions à la MEP, au Jeu de paume, à la BNF, à la Fondation Henri Cartier-Bresson, au BAL, sans oublier moult galeries plus ou moins spécialisées, des festivals comme Photo Saint-Germain et Photo Days, des foires aux livres avec Polycopies et Offprint, le salon Approche, une vente aux enchères chez Christie’s, etc.
ça foisonne, ça bouillonne, ça frissonne
Parce qu’il s’agit quand même de capitaliser sur la venue espérées de riches collectionneurs et autres personnalités du milieu que l’on tentera d’orienter vers ses propres cimaises en espérant que cela déclenchera un bénéfique intérêt. En attendant, c’est bien du côté du Grand Palais Ephémère que les poches remplies d’or et les gros bonnets déambulaient lors de la journée réservée au VIP (Very Important Portefeuille). Si la manifestation oscille entre foire au jambon et Fashion Week, on assiste quand même à la démonstration que le tweet a encore de beaux jours devant lui et que le beige-rosé reste un must-have. Bien que quelques punks osent le rouge, la tendance dominante reste malgré tout le noir, c’est chouette, ça va avec tout, on est jamais déçu.
Nouveauté de cette édition, un secteur dédié au digital, car comme le dit la directrice « Il faut explorer l’évolution de la photographie, à la frontière de l’art et de la technologie ». On a donc exploré les accrochages des quelques galeries présentes où flottait un parfum d’opportunité commerciale lié à l’agitation crée récemment par l’intelligence artificielle. On a quand même eu du mal à se départir d’une impression de déjà vu ou qu’une bonne maitrise de Photoshop donnerait sans doute des rendus similaires. Une exception au stand de L’avant Galerie Vossen où le collectif u2p050 présentait une série représentant des personnalités connues s’auto-embrassant qui ne pouvait qu’attirer l’oeil.
« On raconte des événements produits uniquement par les fake news avec des vraies fausses images générées par intelligence artificielle. Ça a été le point de départ de cette série puisque l’ensemble des scènes de bisous qu’on voit sur le mur, est lié à des moments clés de l’histoire des fake news américaines, comme Hillary Clinton en train de s’embrasser au- dessus d’une pizza pour évoquer le Pizza Gate, où elle a été accusée de soutenir des réseaux pédophiles à Washington. On a également une scène de bisous de Bush dans un uniforme militaire pour évoquer le mensonge sur les armes de destruction massive en Irak en 2003. Et plus récemment, plus contemporain, les tweets d’Elon Musk qui, à tout moment, peuvent bouleverser notre monde contemporain alors que souvent, ils reposent peu sur la réalité. Et pour Macron, puisqu’on a fait ce projet pendant la réforme des retraites, c’était lié à ses mensonges répétés à ce propos. C’est une démarche philosophique et politique, puisque tout est politique. Et pour qu’il y ait une réaction de leur part, mais finalement, on n’en est pas encore arrivé là. Il n’y a pas eu de réaction. »
Il était temps ensuite de passer au secteur édition, terriblement tentateur comme rentrer dans une confiserie quand on est enfant, le temps de saluer Nelly Monnier et Eric Tabuchi qui, avec leur ouvrage The Third Atlas édité chez Poursuite, ont fait une brillante démonstration d’un usage astucieux et créatif de l’intelligence artificielle.
Avec 191 exposants de tous les pays du monde ou presque, des milliers d’images à voir, les 65 000 visiteurs revendiqués cette année ont pu profiter d’une gigantesque exposition où il était bien difficile de ne pas trouver son bonheur. Paris Photo c’est une foire et, comme dans toutes les foires, il y a de tout, des choses qu’on aime et d’autres qui nous laissent indifférent mais on arrive toujours à y trouver son bonheur, même si l’épaisseur de notre portefeuille nous rappelle bien vite où on est. Au gré d’une flânerie qui permettait de faire un tour d’horizon, certes non exhaustif, de la photographie d’hier et aujourd’hui, on a pu décerner la prime à l’audace pour David Horvitz et la galerie Jean-Kenta Gauthier qui ne présente que des textes blancs sur fond noir décrivant des images avec indication de l’heure de création et du nom du fichier de photos numériques personnelles que l’auteur à effacé. Egalement, prime à l’originalité à Daido Moriyama avec l’installation « The Tokyo toilet / Paris » curieux aménagement présentant des rouleaux de papier hygiénique spécialement conçus pour ce projet. Fabriqués à partir de carton recyclé, sur lesquels sont imprimées des photographies de l’artiste japonais, ça fait son petit effet. Le premier qui dit « C’est à chier! » a perdu.
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Editions Poursuite
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