– Oh ! s’exclame-t-elle tout en cherchant son téléphone pour en capturer l’image et en faire profiter ses petits-fils.
Mais l’écureuil a déjà filé.
– C’est fou, reprend Isabelle, comme il va vite. Quand il court, on dirait qu’il vole, avec sa queue dans son sillage !
– C’est toujours le même ? lui demande l’aveugle.
– Oui, il est roux, et je n’arrive jamais à le photographier.
Et comme s’il venait de l’entendre, l’écureuil revient soudain pour lui offrir un moment rare : debout sur ses pattes arrière, il tient entre ses mains une noix qu’il s’apprête à déguster.
Isabelle s’agite en exclamations muettes.
– Que se passe-t-il ? demande l’aveugle.
– Ne bouge pas…
Elle n’en dit pas plus de peur de déranger l’écureuil, de l’autre côté de la porte-fenêtre du jardin, un beau jardin entretenu à la sauvage, mais l’aveugle comprend l’intensité de l’instant. Il entend ce silence. Mieux, c’est comme s’il voyait ce qui est en train de se jouer. L’impression, pendant cinq secondes, de retrouver la vue. CInq secondes de concentré de beauté du monde.
Cinq secondes pour ne pas désespérer de l’horreur du monde.Dernière révision le 26 décembre 2023 à 11:57 am GMT+0100 par la rédaction
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