Correspondance de Tokyo

World press photo
Naissance d’une icône
pour la cause palestinienne dans les rues de Tokyo

Japon, Tokyo le 11 mai 2024 – Manifestation de soutien à la cause palestinienne – Photo Pierre Boutier

Correspondance de Tokyo

ÇA s’est passé le samedi 11 mai 2024 dans les rues de Tokyo.

Plus d’un millier de japonais défilaient pour l’intifada (soulèvement populaire palestinien) dans les grandes avenues du centre-ville. Une jeune manifestante américaine originaire de l’Utah et son compagnon, brandissaient une affiche stylisée et dessinée reprenant la composition de la photographie primée cette année au World Press Photo : une femme étreint sa nièce dans un linceul.  Elle est morte dans un bombardement israélien à Khan Younès. La photographie réalisée par le photojournaliste Mohamed Salem a été prise en octobre 2023.

World Press Photo de l'année. Une Palestinienne embrasse le corps de sa nièce. Le photographe décrit cette photo, prise quelques jours seulement après l'accouchement de sa propre femme, comme un « moment puissant et triste qui résume le sens plus large de ce qui se passait dans la bande de Gaza ». Elle montre Inas Abu Maamar (36 ans) berçant le corps de sa nièce Saly (5 ans) qui a été tuée avec sa mère et sa sœur, lorsqu'un missile israélien a frappé leur maison, à Khan Younis, Gaza. Photo: Mohammed Salem / Reuters
Photo: Mohammed Salem / Reuters

Tout photojournaliste espère  secrètement qu’une de ses images sensibilisera un jour les foules pour les motiver à agir pour l’amélioration du monde. C’est presque chose faite pour la photo de Mohammed Salem;  depuis,  des tentes s’installent ici et là sur les campus des universités les plus prestigieuses du Japon et , pour l’instant le pouvoir n’a pas l’intention de vouloir déloger les futures élites de la Nation.

Revenons à l’icône, cette maternité arrachée, portée par cette femme… L’image est dans l’idée que Saint Luc, peintre d’icône sous l’empereur Constantin, voulait attribuer au pouvoir,  à l’efficacité de l’image;  ce que les iconoclastes ont essayé en vain de supprimer.

L’image de la mère et de sa nièce est très christique. Elle renvoie aux premières icônes de la Vierge tenant le fils prodigue réalisées en Palestine.   La différence est isi que les victimes sont majoritairement, des civils musulmans. L’image se référe également  à la Mater Dolorosa de Carlo Dolci, ainsi qu’à toutes les Pietà qui ont illustré l’histoire de l’art. Autre  différence :  aucun visage n’est visible dans la photographie du photojournaliste palestinien.

L’image du World Press Photo du photographe Mohamed Salem est quasi passée inaperçue pour le grand public. C’est une image où la douleur est contenue sous les drapés.  Le voile couleur sable couvre la mère épleurée,  pas de cri,  pas de traits tordus de douleur.  Pas de chagrin visible. Le corps et le visage sans vie de l’enfant sont invisible.

Ce samedi 11 mai 2024 au Japon, dans la nuit Tokyoite, à côté de cette pancarte avec la photo  stylisée de Mohamed Salem, une américaine marche et crie des slogans pour la révolution en Palestine et une nouvelle Intifada ! Dernière révision le 30 mai 2024 à 4;45 par la rédaction

Pierre Boutier


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