Les mots peuvent s’envoler, emporter par les rayons du soleil. Il faut alors changer de position, se tourner, incliner le livre pour que de l’ombre resurgissent les caractères. Il y a des mois que je n’avais pas lu un livre … Des mois ? Peut-être plus…
D’ordinaire, Halbert me lit les ouvrages que je reçois sous forme numérique. Halbert, c’est mon ordinateur, un bon serviteur, un fils saugrenu de Bob Marley et d’Albert Londres, aussi fidèle et efficace que la vieille Hermès de ma jeunesse, mais plus fringuant. Et à mon âge, j’ai besoin de jeunesse pour m’aider à vieillir.
Mais, curieusement, machinalement, cette fois; je ne sais pourquoi, je n’ai pas demandé à l’éditeur de m’envoyer le « pdf » du livre. Une histoire de machine à écrire, ça ne se lit pas électroniquement. Encore que le titre de l’ouvrage « Amour machinal 2.0 » aurait pu m’y inciter. Mais quand on ne craint pas la nostalgie…
L’histoire est fraiche comme un bain matinal dans le soleil de la Méditerranée ; comme un film en N&B de la Nouvelle Vague, comme Only you… Une machine à écrire… Vous savez ces vieux trucs avec des touches qu’il faut vigoureusement mettre en branle pour qu’elles frappent la feuille de papier à travers un ruban encré ; et, miracle compose des mots.
Je crois que j’ai déjà perdu tous les lecteurs de moins de soixante ans !
Donc « faisons jeune ». Un de ces vieux outils, qu’on ne voit plus que dans les films, est exposé devant une boutique du boulevard de Saint Germain des près à Paris. Sur la feuille glissée dans le chariot – oui, ça se nomme ainsi – une femme trahie par l’accord de l’adjectif, a écrit : « Même quand il fait beau, je suis seule ».
Un jeune homme qui passait par là, et aime les machines à écrire, lui répond. Une conversation entre deux anonymes s’engage ; puis, se termine par la fuite de la jeune femme. Nous sommes en 1976.
Quarante ans plus tard, le jeune home est devenu vieux, et, tout en restant amoureux des vieilles machines qu’il répare, s’y entend également en informatique.
Une jeune cliente, lui demande de réparer un e-book, et lui raconte l’anecdote précédente arrivée à sa mère. Le vieux jeune homme est chamboulé. On le serait à moins. Pensez 47 ans plus tard le hasard lui révèle un indice pour retrouver l’ex-jeune femme !
Bien que journaliste féru d’actualité, Maurice Achard, est un grand romantique. Un éditeur intelligent lui a demandé d’écrire une suite à son premier roman « Un Amour Machinal » (Ed. de l’Athanor)… Si, si, il y a encore de vrais éditeurs ! Cela donne un petit livre rafraichissant comme une grande menthe à l’eau, à l’ombre des platannes, l’été en Provence.
Mon conseil de lecture pour les vacances.
Un amour machinal 2.0 de Maurice Achard
Editions Cent Mille Milliards
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