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Le Hangar à Bruxelles, centre d’art dédié à la photographie et l’image, présente une exposition de dix-huit artistes qui ont intégré l’intelligence artificielle générative dans leurs productions explorant des territoires créatifs très divers dans un tour d’horizon éclectiques et tout à fait passionnant.
Delphine Dumont, directrice du Hangar, explique la démarche qui a conduit à cette exposition :
« Il y a tout juste un an, l’idée de cette exposition semblait à la fois audacieuse et troublante. Plonger dans l’univers de l’intelligence artificielle pour explorer ses intersections avec la photographie, une discipline que nous défendons depuis neuf ans au Hangar, pouvait être perçu comme une rupture, voire une trahison. Pourtant, il s’agissait d’une nécessité, presque d’une mission : relever le défi d’un dialogue entre tradition et innovation, et explorer l’avenir de l’image. (…) nous avons choisi un thème structurant: revisiter des faits ou des personnages historiques à travers le prisme de l’intelligence artificielle. Ce cadre nous a permis d’éviter l’abstraction purement esthétique et de centrer la réflexion sur le dialogue entre passé et futur. »
L’historien de la photographie Michel Poivert, co-curateur de la manifestation, pose en préambule la question : qui a peur de l’intelligence artificielle ?
« Quels mondes nous permet d’imaginer l’IA ? Un univers aliénant de nos mémoires reconfigurées, ou bien la promesse émancipatrice de nouveaux récits ? Les êtres chimériques sont des cyborgs inquiétants et des robots indomptables. Mais ils peuvent tout aussi bien révéler des figures fantastiques réparant nos traumatismes. Les photographes ont ici un rôle central. Leurs créations nous disent les potentialités de l’IA tout autant que leurs limites. Ils nous révèlent leur nature spectrale. Ceux qui furent longtemps les témoins du réel avec la photographie documentaire sont devenus des chamans activant des voyages dans l’espace- temps. (…) Que nous apprend l’IA sur la photographie ? Peut-être qu’elle n’a jamais été l’art du réel que l’on a cru. Post-photographes ou néo-photographes, promptographes plus certainement, les artistes nous offrent ici une approche alternative des images à l’heure de l’économie de l’attention. Pour eux, on ne peut plus regarder sans imaginer. »
La sélection présentée est suffisamment diversifiée pour dresser une sorte d’état des lieux d’une « fiction alternative » que peut générer la technologie. Avec la série « Une Histoire parallèle », le duo Brodbeck & de Barbuat, a produit à partir de requêtes descriptives de photos célèbres des propositions qui s’approchent de façon troublante des originaux tout en comportant des erreurs que les artistes ont conservées. On retrouve également la série « 90 miles » de Michael Christopher Brown à propos des migrants cubains, travail qui avait fait l’objet d’une vive polémique à sa sortie mais qui n’a rien perdu de sa pertinence.
Bruce Eesly présente le projet « New Farmer » qui explore les intersections entre la technologie et la nature en créant des scènes agricoles futuristes, questionnant notre relation à l’environnement. Alexey Yurenev entreprend un voyage à travers l’histoire, les espaces et le temps pour renégocier le récit de l’expérience de guerre vécue par son grand-père. David Fathi s’intéresse aux zones d’ombre de la science et de l’histoire pour interroger la véracité des images et la construction de la mémoire collective.
Robin Lopvet joue avec les codes de la photographie et de la culture numérique pour réaliser des scènes absurdes et humoristiques de notre société de consommation. Pascal Sgro présente « Cherry Airlines », une série qui combine photographie et images générées par intelligence artificielle pour créer des scènes de voyages imaginaires. Thèmes de l’urbanité et de l’isolement avec Isidore Hibou, question des frontières entre réalité et fiction pour Jordan Beal. Au final un vaste panorama des possibilités créatives offertes par l’IA, entre réalisme et imaginaire, provoquant une nécessaire interrogation sur le pouvoir des images et notre capacité à les comprendre.
Exposition « AImagine – Photographie et images génératives », Hangar Bruxelles Jusqu’au 15 juin 2025
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