L’agence de presse [1] Atlas Photo à été fondée le 7 juillet 1947 [2], elle a connu ses heures de gloire dans les années 60 et 70 à une époque ou les magazines adoptent de plus en plus largement la couleur. Aujourd’hui cette agence de pionniers de la photographie animalière serait classé dans les défenseurs de la biodiversité.
« L’agence avait été créée par un journaliste et écrivain de tourisme, Gaëtan Fouquet, un photographe réputé, Isaac Kitrosser. Comme l’indiquait clairement son nom de baptême, elle se donnait pour vocation essentielle de rassembler – plus à l’intention des éditeurs et des périodiques que des quotidiens – les meilleures photos de tout ce que le monde compte de merveilles, naturelles ou non, villes, campagnes, océans, fleuves, forêts. Une agence géographique, si l’on préfère » raconte l’excellent journaliste du Monde qu’était Jean-Michel Durand-Souffland dans un article intitulé « Clichés en solde Atlas Photo a fermé ses portes ».
« Vers 1956, l’affaire change de mains et, du même coup, de spécialisation : le nouveau patron, qui détient des intérêts dans la revue Sciences & Avenir, oriente bientôt les collections, sans pour autant réduire le fonds existant, vers les documents à caractère scientifique. [3]»
Arrive alors un nouveau directeur, Pierre-Louis Chicandard. Entré en Résistance à dix-sept ans, engagé en 1944 dans la 2ème Division Blindée du Général Leclerc, c’est un ami de Philippe Viannay, cet autre résistant fondateur de Défense de la France. Aux Glénans, Pierre-Louis fait partie du projet de construction d’un voilier pour faire le tour du monde. Journaliste titulaire de la carte de presse n° 429, Pierre-Louis Chicandard, signe en 1964,la demande d’adhésion d’Atlas Photo à la Fédération Française des Agences de Presse (FFAP) en qualité de rédacteur en chef gérant.
Atlas Photo se définit comme « une agence qui fournit des photographies d’illustration à la presse » dont les locaux, boulevard Raspail, occupent deux pièces de 35 m2. Atlas Photo déclare employer un journaliste professionnel à plein temps, 8 journalistes pigistes, 3 employés de presse et 96 correspondants.
A la demande de Raymond Grosset mandaté par la FFAP, Pierre-Louis Chicandard précise que le chiffre d’affaires de l’agence avec la presse est de 58,54% pour la période du 1er janvier au 31 août 1964 [4]. Dans son rapport d’enquête pour la CPPAP, Raymond Grosset note « Contrôlée par Sciences & Avenir pendant plusieurs années, l’Agence Atlas Photo a repris son indépendance depuis la cession des parts appartenant à Madame Lefèbvre [5], veuve du directeur de Sciences & Avenir [6] ; et donne un avis favorable à son adhésion à la FFAP :
« c’est une affaire sérieuse en progression constante »
Atlas Photo s’oriente alors, avec succès, vers une photothèque animalière, l’une des premières dans la spécialité, avec les signatures des photographes Jean Dragesco, François Merlet, Jacques Six ou André Fatras.
« En janvier 1963, François Merlet est à l’origine d’une retentissante polémique. Persuadé qu’il reste encore quelques loups en France, il part à leur quête en étudiant les mœurs, les habitudes du fauve, ses terrains de prédilection, etc. Et il trouve ! Paris Match publie la photo d’un loup qu’il a prise dans le Berry ! Grosse sensation ! Certains crient à la supercherie… [7]»
Pourtant la concurrence est rude avec les agences Jacana et Pitch où collaborent d’anciens photographes d’Atlas Photo et l’agence Rapho.
Le 16 janvier 1969, on retrouve une inscription de la Sarl Atlas Photo au registre du commerce sous le n°692 001 761 avec un capital de 10 000 Francs (13 172€), mais aucun acte n’est déposé… Et nous ignorons ce que fut la vie de l’agence jusqu’en 1976 lorsque Alain Dubuisson prend la direction de l’agence.
Quelques années plus tard, en 1985, Il confie à Jean-Michel Durand-Souffland :
« Le plus rude coup nous a été porté par les éditeurs de manuels scolaires …/… nous travaillions beaucoup avec ces maisons-là, au point que, pour ce qui nous concerne, les commandes-éditeurs représentaient, bon an mal an, jusqu’à 14 % de notre chiffre d’affaires annuel. La chute s’est accentuée ces dernières années de façon vertigineuse : tel éditeur qui représentait 80 000 F (24 700€) de facturation en 1982, n’en comptait plus que pour 35 000 F en 1983 et… 3 000 l’an dernier ! [8]»
Alain Dubuisson ajoute :
« Pour survivre, sinon vivre, il aurait fallu pouvoir rentrer en photothèque environ trente mille nouveaux documents chaque année, et en éliminer à peu près autant dans le même temps …/… On avait envisagé, à un moment, d’investir dans la saisie informatique du fonds, mais il a fallu y renoncer, trop onéreux, trop long à réaliser et, au bout du compte, peu de garanties de rentabilité. »
Avec 350 000 photos N&B, 500 000 diapositives produites par 400 photographes, huit salariés, Atlas Photo est contrainte de fermer. La société est radiée du registre du commerce le 16 novembre 1993.
On ignore ou se trouve les fonds photographiques.
Notes
- [1] Agrément de Commission Paritaire des Publications et Agences de Presse (CPPAP) de 1968 à 1986
- [2] Date déclarée sur la demande d’adhésion à la FFAP en date du 2 septembre 1964. Source : Archives FFAP
- [3] Jean-Michel Durand-Souffland in Clichés en solde Atlas Photo a fermé ses portes. Le Monde du 28 janvier 1985
- [4] Pierre Louis Chicandard, courrier du 2 octobre 1964 à Raymond Grosset chargé d’enquête par la FFAP
- [5] Gérard Lefèbvre est un journaliste fondateur en 1947 de Sciences & Avenir qui a pris une participation dans l’agence Atlas Photo. Il est décédé le 22 juin 1962, à 38 ans.
- [6] Rapport d’enquête de Raymond Grosset pour la FFAP en date du 5 octobre 1964.
- [7] Citation de La Nouvelle République du 13 juin 2018 à propos du film « François Merlet déclencheur de passion » d’Yves Lanceau
- [8] Jean-Michel Durand-Souffland in Clichés en solde Atlas Photo a fermé ses portes. Le Monde du 28 janvier 1985
Dernière révision le 20 novembre 2024 à 10:44 am GMT+0100 par la rédaction
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